« Philippe Gilbert, vous refusiez le statut de favori avant la course, et pourtant...
J’avais de la pression, j’ai ressenti du stress, j’avais six points de retard (l’équivalent d’une neuvième place) sur Evans. C’était peu et à la fois beaucoup, d’autant que je n’avais pas d’équipe. Elle était très faible. J’ai été seul pendant quasiment toute la course et à la fin j’ai un peu paniqué en me demandant comment j’allais m’en sortir.
Comment s’est déroulée la course ?
Elle était extrêmement difficile car Sky l’a rapidement durcie. Ça roulait très, très vite. Le vent était défavorable dans la dernière ligne droite (à 4%), et ça décourageait les attaques. A la fin, c’était plus simple car nous étions entre favoris. Je suis sorti sur la ligne (au dernier passage d’un circuit de 12,6 km à parcourir 16 fois). Quand j’ai compris que les points étaient assurés, j’ai pensé à gagner la course. Les neuf de derrière (Gesink, Uran, Wegmann, Leipheimer, Leukemans, Ponzi, Marcato, Ciolek et Clarke) menaient un rythme constant, ils ne se désorganisaient pas, ils m’avaient en point de mire. Si j’avais insisté, j’aurais cédé dans la dernière montée.
Robert Gesink a attaqué à quatre kilomètres, puis vous l’avez contré à deux kilomètres.
C’était très dur de lui résister. Il était juste derrière moi, j’ai géré. A 700 mètres de la ligne, j’ai décidé de récupérer un peu. A 500 mètres, je suis reparti. A 100 mètres, j’ai profité de ce moment magnifique. Je fais coup double : la victoire dans une épreuve du World Tour et la place de numéro 1 mondial (il est assuré de la conserver jusqu’à la fin de la saison). C’était une journée exceptionnelle. Mon contrat est rempli. Tout ce qui pourrait encore venir sera du bonus. J’avais déjà réalisé une grande saison en 2010. Mais celle-là est encore supérieure. Un grand crû comme on dit. »
Propos recueillis par Jean-Luc GATELLIER, à Québec