Des 40 km d’ascension empilés dans les 80 dernières bornes de la première étape pyrénéenne, les favoris annoncés pour le Maillot Jaune n’ont gardé que les quatre derniers vers la station de Luz-Ardiden. Ces 4.000 mètres n’ont pas suffi à cerner l’état de force profond dans le peloton mais ils ont permis de discerner les effets de bluff de la forme réelle de certains : dans la perspective du podium sur les Champs-Elysées, le roi craint des Grands Tours, Alberto Contador, a plafonné au fil des accélérations des frères Schleck. Après avoir répondu aux premières tentatives des grimpeurs luxembourgeois, l’Espagnol (8e du jour à 43’’ de Sanchez) a d’abord laissé partir Frank (3e à 10’’) sous la banderole des 3 km puis a vu s’éloigner le trio Basso - Evans - Andy Schleck (à 30’’) après un nouveau changement de rythme sous la flamme rouge. Le triple vainqueur du Tour pointe au général à 2’21’’ de l’aîné des Schleck et à 1’54’’ de Cadel Evans. « Je n’ai pas mes jambes habituelles. C’est la conséquence de ma chute, a constaté un Contador pas vraiment effondré à l’arrivée. Mais jour après jour, j’irai mieux. »
Douzième de l’étape, Arnold Jeannesson (FDJ) prend le Maillot Blanc à Robert Gesink (Rabobank). Il devance désormais Rein Taarame (Cofidis).
Cette attente timide et craintive entre les leaders (« C’était un premier test », dixit Andy Schleck) a offert à Thomas Voeckler les conditions idéales pour défendre son Maillot Jaune. « J’ai serré les fesses », a reconnu le leader d’Europcar à sa descente du vélo : proche de la chute dans la descente de la Hourchette dans un virage qui a mis à terre Andreas Klöden, Voeckler a ensuite rivalisé avec les purs grimpeurs dans la montée finale (9e à 50’’), bien calé dans la roue d’un Pierre Rolland devenu gregario de luxe, et résistant aux accélérations bien plus longtemps que Tony Martin ou Robert Gesink (à la dérive dès la première montée). « Cela va être difficile de faire plusieurs jours comme aujourd’hui car c’est extrêmement éprouvant »,commente le Maillot Jaune. « Logiquement, je ne pensais pas le garder mais c’est une bonne surprise. Je suis content d’avoir eu tort. »
Dix ans après Roberto Laiseka, Samuel Sanchez a offert la deuxième étape pyrénéenne à l’équipe Euskaltel - Euskadi.
Quatrième du Tour de France 2010 et outsider pour le podium, Samuel Sanchez n’est pas resté à regarder ses rivaux dans le blanc des yeux dans l’ascension de Luz-Ardiden : le leader d’Euskatel est parti à l’offensive dès le pied de la montée de 13 km, seulement suivi par le Belge Jelle Vanendert (Omega Pharma). Evoluant au milieu d’une foule de supporters basques survoltés, il a repris à 7 km de la ligne le Britannique Geraint Thomas (Sky) et le Français Jérémy Roy (FDJ), échappés depuis le premier kilomètre et encore en tête avec trois minutes d’avance au passage du Tourmalet. Après une ultime accélération dans les derniers hectomètres, le champion olympique de Pékin s’est offert sa première victoire d’étape sur le Tour de France. Désormais meilleur grimpeur du Tour, Sanchez va-t-il jouer sa chance au général ou devenir le meilleur allié d’Alberto Contador ? « Chacun son maillot, chacun son équipe, mais si à un moment, on peut s’aider, on le fera. »
A. T.-C., à Luz-Ardiden