VELO CLUB DE CLAMECY UFOLEP

Cyclisme, Interview de C. Le Mével

vendredi 4 février 2011.

« Si on ne prend pas de risque… »

Christophe Le Mével

Christophe Le Mével est en quête du meilleur de lui-même (Panoramic)

Christophe Le Mével, qui effectuera sa rentrée à l’occasion du Tour Méditerranéen, portera en 2011 un nouveau maillot : celui de Garmin-Cervélo. Une remise en question assumée par le coureur breton, quitte à ne pas faire le Tour de France.

par Florian Egly, le 04-02-2011

Sport24.com : Christophe, pour la première fois dans votre carrière, vous courez au sein d’une équipe étrangère. Comment s’est passée l’intégration ?
Christophe Le Mével : L’intégration s’est super bien passée. Notre premier stage était aux Iles Caïman. C’était vraiment bon enfant. On a fait des activités tous ensemble. On a appris à se connaître à travers ces activités, c’était bien marrant. Je connaissais déjà pas mal de monde en arrivant ici, que ce soit d’anciens coéquipiers ou simplement en tant que coureurs et personnes. Je pense que je devais faire un effort au niveau de l’anglais, des langues. Je l’ai fait. Ce n’était pas à eux de s’intégrer à moi mais le contraire. Pour l’instant, ça se passe bien, je suis content.

Sport24.com : Pourquoi avoir fait ce choix de signer dans une équipe étrangère ?
Christophe Le Mével : Pourquoi ce choix ? Parce que cela faisait quelque temps que j’étais dans des équipes françaises. J’ai toujours eu l’idée de partir un jour. Je voulais connaître au moins une fois durant ma carrière l’expérience de courir dans une équipe étrangère, et qui plus est dans l’une des meilleures équipes au monde. J’ai aussi 30 ans. Si je ne l’avais pas fait maintenant, je pense que je serais toujours resté en France. Je sais aussi que je viens dans une équipe comme celle-là avec un rôle de capitaine de route sur certaines courses comme le Giro, Paris-Nice. C’est ce qui m’intéresse aussi, être un coureur protégé dans l’une des plus grosses équipes du monde.

Sport24.com : En France, vous aviez un statut assuré, vous bénéficiiez d’un certain confort. En venant dans une équipe étrangère, vous avez finalement beaucoup de choses à prouver. C’est un gros risque…
Christophe Le Mével : C’est sûr que j’ai pris un risque de venir dans une équipe étrangère telle que celle-ci. Mais en même temps, si je ne prends pas de risque dans ma vie, comment j’avance ? C’est un risque mais un risque mesuré. Je pense que le potentiel, je l’ai. Je sais que je suis capable de faire de belles choses. Avec les coureurs qu’on a dans l’équipe, peut-être que je vais être poussé encore plus vers l’avant. Sûrement qu’à la FDJ ou dans une équipe française, j’aurais eu un rôle un peu plus tranquille. J’étais sûr de faire le Tour de France, telle chose ou telle chose mais ce n’est peut-être pas ce que je recherche non plus.

« Chercher le meilleur de soi-même » 

Sport24.com : C’est-à-dire ?
Christophe Le Mével : Peut-être que dans deux ans, je me dirai que c’était une mauvaise idée mais je ne pense pas parce que cette prise de risque, je l’ai calculée avant de venir. Je savais qu’elle était là et en même temps je la voulais. Je n’ai pas pris beaucoup de risques quand j’étais au Crédit Agricole. J’étais bien, j’étais à l’aise, j’étais dans mon cocon. Si le Crédit Agricole avait continué, j’aurais peut-être fait toute ma carrière là-bas. Après avoir vécu dans ce cocon pendant six, sept ans, je me suis dit qu’il fallait que je prenne des risques. On ne vit qu’une fois. J’ai toujours été à la recherche du plus haut niveau. Le fait d’être dans l’une des plus grosses équipes du monde, ça correspond à cette volonté-là.

Sport24.com : C’est une démarche assez rare dans le peloton français…
Christophe Le Mével : C’est dur pour un coureur français de partir dans une équipe étrangère parce qu’il faut aimer prendre des risques. Quand on est dans une équipe française, on sait qu’on est bien. On est dans le confort, dans la sérénité parce qu’une équipe française, c’est bien réglé. Je suis plus dans un tempérament où j’aime changer. J’ai déménagé plusieurs fois. Je suis parti de Bretagne pour aller m’entraîner à Nice. Aujourd’hui, je me suis installé en Suisse pour essayer de trouver des cols encore plus durs à l’entraînement. Ici, je vois les Australiens, les Américains venir en Europe une partie de la saison. Il faut aller vers l’avant. Parfois, laisser pendant cinq, six ans sa famille, sa maison… Les Australiens, les Américains, ils savent qu’un jour ou l’autre, ils retourneront chez eux en ayant donné le meilleur d’eux-mêmes. Il faut faire beaucoup de concessions. Moi, j’ai tout laissé en Bretagne pour partir. Ça a marché. La carrière est une période assez courte dans une vie. On est professionnel donc on se doit de viser le plus haut niveau, de chercher le meilleur de soi-même tout le temps. Si on ne fait pas cette première chose, qui est la primordiale, ça ne marchera pas.

Sport24.com : Avez-vous craint également en restant en France de ne pas être certain de disputer les meilleures courses ?
Christophe Le Mével : C’est vrai que ma recherche, c’est d’être au plus haut niveau. Cela aurait pu me faire peur d’être recalé en Continental Pro mais en même temps je n’y ai pas trop pensé parce que je pensais vraiment que la FDJ resterait en Pro Tour. J’ai été très surpris qu’elle soit reléguée, vu le recrutement qu’elle a fait, la valeur de l’équipe, un contrat de quatre ans avec la Française des Jeux. C’était la dernière chose à laquelle on pouvait s’attendre. Je trouve ça dommage pour cette équipe qui méritait sa place en Pro Tour peut-être plus que d’autres.

Sport24.com : Que vous ont apporté vos deux années à la FDJ ?
Christophe Le Mével : Tout le monde me dit qu’on connaissait mon potentiel au Crédit Agricole vu que je travaillais beaucoup pour Thor (Hushovd) et qu’ensuite, j’arrivais dans la montagne à être parmi les meilleurs. Mais c’est vrai qu’à la FDJ, j’ai pris conscience que je pouvais faire mieux. C’est-à-dire faire un classement général, gagner des courses, ce que je ne faisais pas au Crédit Agricole. S’il y avait une occasion à saisir, je la saisissais mais mon rôle, c’était plus d’être l’équipier de Thor (Hushovd). Frédéric Grappe (Ndlr : son entraîneur à la FDJ) m’a beaucoup apporté. C’est lui qui m’a fait prendre conscience que j’étais capable de faire de très belles choses. Il m’a donné une certaine confiance que peut-être avant, je n’avais pas. J’en garde un très bon souvenir, de même que je garde de très bons contacts avec Marc Madiot, et tout le staff. Ils ont compris pourquoi je suis parti, il n’y a pas eu de souci.

« Leader sur le Giro dans une grande équipe, ça se prend »

Sport24.com : Aviez-vous fait le tour des équipes françaises ?
Christophe Le Mével : Non, pas vraiment. Je pense que j’étais bien au Crédit Agricole pendant six, sept ans. J’ai été bien aussi à la FDJ, c’est une super équipe. On a de super équipes en France. Il n’est pas dit que je ne revienne pas en France un jour ou l’autre, mais pour l’instant c’est Garmin-Cervélo et j’en suis très content (sourire).

Sport24.com : Quelles différences avez-vous pu déjà constater ?
Christophe Le Mével  : Ce n’est pas plus professionnel mais on va peut-être chercher des choses un peu plus poussées qu’en France. Comme les tests de Vo2 Max. Je n’avais jamais fait un test comme ça. A la fin, j’étais vidé. Sur la position en chrono, ils sont aussi hyper pointilleux. Je l’étais déjà l’année dernière avec Fred (Grappe) mais ici, c’est pour tout le monde pareil. Ils sont peut-être un peu plus minutieux sur certaines choses que d’autres. Par exemple, les gens de Cervélo sont venus nous montrer l’efficacité de leur vélo. C’est intéressant pour nous de savoir comment et pourquoi ça marche. C’est comme un pilote automobile qui découvre sa voiture et demande : « pourquoi il y a ça ? ». On a beau dire : « Cervélo est le meilleur vélo du circuit ». Là, par A+B, ils démontrent pourquoi. 

Sport24.com : Quel rôle a joué Jonathan Vaughters dans votre arrivée ?
Christophe Le Mével : Je m’entendais très bien avec Jonathan au Crédit Agricole. L’année où j’ai couru avec lui, j’ai eu un grave accident (Ndlr : section du nerf sciatique). Il était l’un de ceux qui venaient aux nouvelles, qui demandaient si ça allait. Quand on est jeune coureur, j’avais 21, 22 ans, on garde ça dans la tête. Cela veut dire l’homme qu’il était déjà. J’ai eu des contacts avec d’autres équipes. Mais le meilleur feeling que j’avais, c’était avec Jonathan.

Sport24.com : Quel rôle aurez-vous dans cette équipe ?
Christophe Le Mével : Je serai l’un des deux leaders sur le Giro. Le Tour de France étant axé sur le Maillot Vert avec Thor (Hushovd) et Tyler Farrar, je n’irai probablement pas. Le Tour de France reste la plus belle course au monde, qui plus est quand on est coureur français. Mais quand on a une opportunité à saisir comme être leader sur le Giro dans l’une des plus grosses équipes, il faut la prendre. Je suis là aussi pour tenter ma chance sur de grosses courses comme ça. Ce sera mon principal objectif, même s’il y a beaucoup de courses qui m’intéressent comme Paris-Nice, le Dauphiné, le Championnat de France, les Ardennaises. Un Top 10 sur le Giro, ce serait bien.

Sport24.com : En signant chez Garmin-Cervélo, vous avez aussi pu retrouver Thor Hushovd (ndlr : ils ont été coéquipiers entre 2002 et 2008)…
Christophe Le Mével : On s’est fait des bisous (sourire). Thor, je suis resté en contact avec lui. Il habitait près de chez moi, à Monaco, donc on arrivait à se retrouver. Mais sans doute, je ne vais pas le voir beaucoup cette année vu que je ne suis plus dans le rôle de son équipier. Je ne serais pas sur le Tour de France, Paris-Roubaix... On va peut-être courir une ou deux fois ensemble. On se croisera plus autour d’une table que sur la route (sourire).



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