VELO CLUB DE CLAMECY UFOLEP

Portrait : « Hinault, il adorait cirer les pompes »

Surtout les siennes avec du cirage noir !
samedi 15 novembre 2014 par vcc ufolep

Ce vendredi 14 novembre, Bernard Hinault fête ses 60 ans. À cette occasion, voici un petit pot pourri d’anecdotes racontées par d’anciens équipiers, qui esquissent un portrait du « Blaireau », quintuple vainqueur du Tour de France.




CHEVEUX LONGS, CHAUSSETTES TRICOLORE : UN « CHARLOT »
Maurice Le Guilloux (équipier chez Gitane en 1975, Renault de 1979 à 1983, La Vie Claire en 1984) : « La première fois que j’ai vu Hinault, il n’avait même pas vingt ans, j’en avais quatre de plus. On parlait de Hinault dans la région, c’était tout nouveau. Par curiosité, une semaine avant Paris-Tours, je ne courais pas et il y avait une course toutes catégories à la sortie d’Yffiniac (le patelin d’origine de Hinault) avec les meilleurs Bretons. Il avait des cheveux longs, il courait avec des chaussettes bleu-blanc-rouge, on se disait que c’était un charlot, il n’avait pas l’allure d’un coureur.



Son vélo était tout pourri, une charrette, les mecs d’aujourd’hui le mettraient à la décharge tout de suite. Il fait la course à bloc, tous les sprints, gagne toutes les primes… Et remporte la course. A l’arrivée, je vais voir Michel Le Denmat et Henri Le Gall, qui étaient vraiment de très bons coureurs. "Vous l’avez laissé gagner. - Arrête tes conneries, Maurice, on a tout fait, on était dix dans le coup pour le flinguer, mais il nous a déposés." »




FAISAN, BETTERAVES ET TAPIE
Jean-François Bernard (équipier à La Vie Claire de 1984 à 1986) : « Un jour, je vais chez lui, au Quessoy, pour essayer du matériel ou je ne sais quoi. On sort pour s’entraîner et là, il y a un faisan en train de se promener, mais qui n’a rien demandé à personne. L’autre (Hinault), il retourne à la maison chercher le fusil, en godasses de vélo, et pan, il tue le faisan, habillé en coureur. C’est Bernard Hinault, faut y être pour voir le truc. Un autre jour, on part s’entraîner (avant le Tour de Lombardie 1984, qu’il remportera) et on se fait arrêter par un agriculteur qui lui propose de lui faire visiter ses champs. Le voilà sur un tracteur au milieu de dizaines d’hectares de champs de betteraves, et nous, on l’attend au bord de la route. Il revient, on repart, et là au village suivant, il veut s’arrêter à la boulangerie, pour bouffer deux, trois pâtisseries. Et c’était fini, on avait fait 20 km en 1h30. C’était toujours spécial, parce que quand il était décidé, tu rentrais râpé, t’avais même plus envie de manger, mais quand il n’avait pas envie, il te promenait partout sans rien faire.



En 1985, avant le Tour de France, on avait une réunion à l’aérodrome d’Auxerre parce qu’on dormait là-bas au moment du Championnat de France à Chailley. Tapie (alors patron de la Vie Claire) était arrivé en jet. "Bon, j’entends plein de bruits comme quoi vous suivez pas les entraînements de Koechli." On avait tous une feuille et un crayon devant nous, et Hinault était en train de faire des dessins, il n’écoutait pas ce que disait Tapie, qui balance : "Levez la main ceux qui suivent les plans d’entraînement de Paul". Hinault est en train de machiner et il lève la main. Tout le monde rigole parce qu’il est le seul à le faire, alors que lui, quand il devait faire 100 bornes, il en faisait 0, et quand il devait en faire 50, il en faisait 200. Tapie avait répondu : "Toi, c’est bon, ton avis je ne le veux même pas". »




PREMIÈRES ÉTINCELLES AVEC FIGNON
Alain Vigneron (équipier chez Renault de 1981 à 1983 et à La Vie Claire de 1984 à 1986) : « Fignon avait débarqué chez Renault en 1982 avec Pascal Jules. En février, on est en stage pour cinq semaines à Opio, et ç’a été la rencontre de deux mondes, Hinault sortait de sa Bretagne et eux, c’étaient deux Parigots. A table, les néo-pros se mettaient d’un côté, donc tu avais à un bout Fignon, et à l’autre le Blaireau. Fignon se met à héler Hinault. "Toi là-bas, je te laisse encore un an". Sous-entendu, pour t’arranger. Mais c’était pour le charrier, parce qu’il l’admirait et, au fond, il savait que Hinault était meilleur. Mais Bernard, il n’a pas de réplique, c’était un choc de générations, de régions, de cultures… Pour lui, ça se réglerait sur le vélo. »




BRISEUR DE CARRIÈRES
Marc Madiot (équipier chez Renault de 1980 à 1983) : « Le Tour d’Italie 1982 était mon premier grand Tour, j’étais jeune, je débarquais dans le bazar. Au briefing, Guimard nous demande de rouler à bloc jusqu’à dix kilomètres de l’arrivée, au pied du col. "A ce moment-là, le Blaireau va passer et le Tour d’Italie sera fini." Pas de problème. On se met en branle, à bloc, on s’écarte, et le Blaireau n’est pas passé, il explose, perd deux, trois minutes et Contini prend le maillot rose. Le soir à l’hôtel, il gueule "nom de Dieu, demain (au Montecampione) on recommence". Le lendemain, on remet en route, il gueule "plus vite, à fond !". On se gare au pied du talus, et là le Blaireau sort. En 500 mètres, il a brisé la carrière de Contini, qui a compris ce jour-là qu’il ne serait pas un grand champion. Le Blaireau avait le maillot rose. Le Giro était terminé. »



LE CHASSEUR FRANÇAIS, LA LESSIVE, LE CIRAGE
Maurice Le Guilloux : « J’ai passé beaucoup de temps avec lui en chambre, et ce n’était pas toujours un cadeau parce qu’il ne dormait jamais. Quand on était dans la campagne des classiques, on dormait à Mons-en-Baroeul, au-dessus d’un troquet, on payait 25 francs par jour tout compris, y compris le ravito. Les piaules étaient pourries, chauffées au gaz, on a failli mourir plusieurs fois. Les toilettes, c’était avec un seau au fond du jardin. Il fallait faire 50 mètres pour y aller, alors la nuit, on pissait par la fenêtre. Bernard regardait toujours des conneries à la télé, des films anglais sous-titrés en flamand, je lui disais de baisser le son parce qu’il ne comprenait rien, il répondait : "ouais, mais l’ambiance…"



Si un jour j’avais trouvé le Blaireau endormi avant moi, j’aurais pensé qu’il était malade. Il lisait des conneries comme Le Chasseur français, Lui, Reader’s Digest. C’est le premier coureur du peloton à avoir utilisé de la lessive liquide, avant on avait un morceau de savon dans la trousse de toilette. On lavait encore nous-mêmes nos maillots, cuissards, chaussettes. L’équipier, historiquement, faisait la lessive, mais c’est Bernard qui nettoyait mon maillot, il était très fier de faire ça. Il lavait les cuissards avec le maillot jaune sur le dos, puis il étendait tout sur un fil, il était très content. Il adorait cirer les pompes aussi, avec du cirage bien noir. »
A. Ro.



Source :http://www.lequipe.fr/Cyclisme-sur-route/Actualites/-hinault-il-adorait-cirer-les-pompes/514732


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